Quatre méthodes contraceptives pour pénis existent à l’heure actuelle :

  • le préservatif
  • la méthode thermique, qui consiste à augmenter légèrement la température des testicules (entre deux et trois degrés) par la chaleur corporelle grâce à un sous-vêtement adapté.
  • la méthode hormonale, validée par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) en 1994, consiste à stopper la production de spermatozoïdes par une injection hebdomadaire intramusculaire. Les effets secondaires sont les mêmes observés que ceux engendrés par la contraception hormonale pour utérus.
  • la vasectomie.

Depuis 2001, la loi française stipule que toute personne majeure ayant « exprimé une volonté libre, motivée et délibérée en considération d’une information claire et complète sur ses conséquences » devrait pouvoir obtenir une stérilisation. La vasectomie ne nécessite pas d’opération mais rencontre pourtant peu de succès dans la population française. En 2018, 3000 vasectomies ont été effectuées. C‘est cinq fois plus qu’en 2010 mais cela représente moins d’1% de la population masculine française. En comparaison, 15% à 20% des hommes y ont recours au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, tandis qu’en Allemagne 50 000 vasectomies y ont lieu chaque année. (Voir les chiffres de l’Association de recherche pour le développement de la contraception masculine (Ardecom). Ce sont donc les femmes qui portent la charge mentale de la contraception dans les couples hétérosexuels, comme l’explique très bien l’illustratrice Emma dans l’extrait ci-dessous de sa bande-dessinée « Les conséquences ».

Illustration © Emma. Dans « Les conséquences ».
Illustration © Emma. Avec son aimable autorisation. Dans « Les conséquences ».

Le gros avantage de la contraception thermique c’est qu’on peut se passer du médical. C’est le spermogramme qui va te dire si ça fonctionne ou pas.

À 64 ans, Christian est l’un des co-créateurs du collectif breton Thomas Bouloù. En breton, tomma signifie chauffer et bouloù, testicules. Créé en 2015, leur objectif est d’apporter de l’information et de produire des échanges sur la contraception pour pénis. Pendant trois ans, le collectif a enchaîné les contracep’tours un peu partout en France. Le procédé est presque toujours le même : ils proposent d’abord une session de formation et de discussion sur les différentes méthodes contraceptives, puis un atelier de fabrication de slips chauffants do it yourself (DIY) (fais-le toi-même, ndlr). Le collectif travaille parfois avec le réseau du Planning familial. Christian explique : « Le sujet est aussi un prétexte pour en aborder d’autres, comme la sexualité, la parentalité, et bien sûr le patriarcat. » Il confie avoir lui-même appris l’existence des méthodes thermiques et hormonales en regardant le film documentaire Vade Retro Spermato, sorti en 2011. Pour Christian, depuis le début de leurs actions, les mentalités changent petit à petit et le sujet se démocratise. « Au début, nous avions trois quart de femmes qui venaient aux ateliers, pour un quart d’hommes dont la plupart accompagnaient des femmes. » Le collectif se rendait aussi sur les marchés à la rencontre de publics potentiels. « Quand c’était des couples hétéros qui venaient à notre rencontre, c’était la femme qui nous parlait et échangeait avec nous. Le mec restait derrière et prenait grand soin de regarder ailleurs. », ironise t-il. Mais petit à petit, les médias s’emparent du sujet.

Atelier couture de sous-vêtements contraceptifs dans le Tarn avec le collectif GARÇON
Atelier couture de sous-vêtements contraceptifs dans le Tarn avec le collectif GARÇON
© Collectif GARÇON 

Le ton dans les médias a changé. Il y a encore cinq ans, on parlait de la contraception pour pénis sur le ton de l’humour. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, et c’est super important !

Mieux, des petits collectifs essaiment un peu partout en France. « Ce sont souvent des petits groupes de trois ou quatre garçons. Ils s’emparent du sujet, créent des petits fascicules à distribuer. » Parmi eux, le collectif toulousain GARÇON (Groupe d’action et de recherche sur la contraception), mais d’autres groupes existent et peuvent être contactés via l’ARDECOM. La grande majorité des hommes n’a pas de suivis andrologiques, et dans les couples hétérosexuels, la charge mentale est rarement partagée. « La plupart des hommes ne se posent même pas cette question. Éventuellement, ils vont consulter s’ils rencontrent un problème. Et encore, ils ont déjà souvent dû mal à aller faire un spermogramme. » Christian raconte avoir consulté un médecin dans les années 1980 afin de s’informer du sujet. « Ma femme rencontrait des soucis avec sa contraception et on a voulu que je prenne le relais. Sans internet, c’était plus compliqué de s’informer autrement qu’avec le médecin, qui nous a dit que des méthodes de contraception masculine n’existaient pas. » La plupart des participants aux ateliers du collectif Thomas Bouloù rencontrent les mêmes discours. « C’est pareil pour la vasectomie. Quand tu as moins de 35 ou 40 ans et au minimum 2 enfants, c’est très compliqué… » Pour Christian, la faute à « une politique nataliste française très forte. »

Ça vient questionner pas mal de choses sur ce qu’est la virilité, ce qu’est être un homme.

La chercheuse en sociologie et santé publique Cécile Ventola a publié une thèse en 2017 dans laquelle elle fait une analyse comparative de la contraception dans les systèmes de santé français et britannique. Elle revient sur les processus de médicalisation de la contraception et explique que « défendre l’accès à la contraception comme pratique de santé était plus audible politiquement que la défense de l’autonomie corporelle des femmes et de leur droit à disposer de leur corps. » L’accès à la contraception a ainsi été confié à une profession « traditionnellement réticente » et s’est inscrit « dans le prolongement du développement d‘une médecine de femmes, historiquement caractérisée par un regard médical normatif, voire pathologisant, sur les femmes. » À l’inverse, la diffusion d’information et des méthodes contraceptives s’est construite en-dehors du domaine médical au Royaume-Uni, où « l’opposition nataliste et catholique » y était beaucoup moins forte qu’en France. En 1961, le premier centre de planification familiale voit le jour en France. C’est 40 ans après l’ouverture du premier centre britannique.

Et en attendant le festival Very Bad Mother, le collectif Thomas Bouloù organise un atelier tous les premiers samedis du mois à la Baleine à Quimper ! Il est aussi présent tous les premiers mardis du mois au Pôle santé de Brest.